À votre service : chapitre 12


Bonjour à tous !

Voici le dernier chapitre de l'année 2017 ! Dans quelques jours, c'est Noël. Le temps passe super vite. Quand je repense aux premiers mots que j'ai posés cet été sur cette histoire, finalement je me rends compte que j'ai parcouru pas mal de chemin depuis. J'espère pouvoir garder ce rythme pour 2018. On verra bien...

Je vous souhaite de joyeuses fêtes !

Jordane Cassidy © 2017

 


 

12

“Le problème du contrat est de savoir sur quoi il se fonde.”

De André Glucksmann  


— Vous n’avez pas peur que je vous vire à force ? Ça devient une manie chez vous ! lui cria-t-il alors.

— Faites, si ça vous chante ! Vous sauverez l’estime de l’idiote de service !

Valentin éclata alors de rire au point de choquer Camille qui s’arrêta net.

— Ça vous fait rire ? lui déclara-t-elle dépitée.

Son patron vint alors vers elle en la contemplant, toujours amusé.

— Oui, j’avoue ! Ça me plaît !

Tout à coup, il lui attrapa la main et la força à le suivre vers le comptoir avec les deux assiettes.

— Mais vous faites quoi ? Je vous ai dit « non ». Vous ne comprenez pas quoi dans ce mot ?

Valentin l’obligea à s’asseoir sur un des tabourets, devant une des assiettes en appuyant bien sur ses épaules pour que ses fesses restent ancrées sur son siège.

— Vous êtes vraiment incroyable ! déclara-t-il, désarçonné par leur relation si particulière. Et je ne dis pas ça parce que vous êtes idiote ! Au contraire !

Il s’assit sur le tabouret à côté d’elle.

— On va essayer d’être clair, puisque vous pensez savoir ce que je pense et agir ainsi en conséquence.

Il la fixa un instant et fit une mine affligée tout en soupirant.

— Si je vous ai embauché, c’est bien pour voir à quel point va votre dévouement pouvant virer à la dévotion ! Alors oui, c’est vrai que votre tendance à vouloir tout faire pour satisfaire les gens que vous côtoyez a le don de m’interroger…

Camille l’observa avec attention.

— Je vais être franc. Oui, je veux quelqu’un dédié à mon bien-être. Mais non, je n’attends pas quelqu’un qui acquiesce pour tout et n’importe quoi, juste parce qu’il faut me faire plaisir. Déjà, un, je ne suis pas le genre à demander des choses extravagantes – et je ne profiterai donc pas de votre dévouement – et deux, je ne supporte pas les gens sans caractère, sans dignité.

Camille loucha sur ses lèvres qui lui parlaient enfin sincèrement. Elle avait du mal à croire que c’était bien les lèvres de son patron qui gesticulaient devant elle.

— Vous n’êtes pas quelqu’un qui se laisse démonter dès qu’on abuse de sa personne. Je l’ai bien constaté, ne vous inquiétez pas ! siffla-t-il comme s’il avait été vacciné pour les dix prochaines années. Vous avez du caractère. La preuve ! Vous voulez encore me snober en m’abandonnant ce soir !

Camille grimaça. Elle regarda sa main que Valentin continuait à tenir du bout des doigts.

— En conclusion, oui, vous faites des bourdes… Oui, vous êtes parfois, enfin souvent maladroite ! J’ai souvent envie de vous étrangler,  de vous attraper par les joues et secouer bien fort devant votre insouciance ou votre insolence plus ou moins volontaire.

Valentin mima ses propos comme un fantasme qu’il assouvissait enfin.

— Je me suis même demandé si c’était moi le problème, si j’étais fou ! Et puis, je voyais la piscine et je me suis souvent dit que vous jeter dedans pourrait peut-être changer les choses… Genre, vous remettre sur le droit chemin, reconnecter votre cerveau… ou bien c’est moi qui ai vraiment besoin de me jeter dedans pour me réveiller de ce que je vis…

Camille constata alors le trouble soudain de Valentin à se demander qui était le plus à plaindre dans l’histoire.

— Oui ! Bon ! C’est bon ! J’ai compris ! Dites que je suis une tête à claques, ça ira plus vite !

— Ouais, c’est ça ! dit-il en la montrant de l’index.

Il posa le plat de ses mains sur les joues de Camille et appuya fortement. Les joues de cette dernière vinrent s’écraser sur son nez tandis que sa bouche ressortait en cul de poule.

— Vous êtes exaspérante ! dit-il alors tout en insistant sur chaque syllabe de l’adjectif et en secouant sa tête d’avant en arrière.

Camille repoussa ses mains d’un geste agacé, ne supportant pas d’être une marionnette entre ses mains sadiques.

— C’est bon ! cria-t-elle. J’ai compris, je viens de dire !

— Je n’ai pas fini ! gronda-t-il à son tour, agacé d’être interrompu à chaque fois.

— Parce qu’il y a encore à dire sur mes défauts ? s’alarma Camille, ébahie par la volonté blessante de son boss de vouloir jouer carte sur table.

— Oui, il y a encore à dire !

— Mais vous êtes affreux !

— Si ça vous fait plaisir de le croire… En attendant, je vous garde ! Vous faites des erreurs, mais j’ai vu et entendu que vous aviez du cœur.

Il se mit à rire, surpris lui-même de devoir reconnaître ses paroles toutes mielleuses. Il posa son index sur son front et appuya fort.

— Ancrez bien ça dans votre crâne ! Je ne jouerai jamais avec vous pour vous blesser. Je suis content de mon embauche. Vous apportez un peu de fraîcheur à mon quotidien et ça me satisfait amplement. C’est ce que j’espérais. Je recherchais un bon feeling avec ma recrue et contre toute attente, j’ai eu un drôle de feeling avec vous. Assez bizarre en y repensant, mais plutôt… mignon !

Il lui sourit, un peu gêné d’admettre cela. Camille se mit à rougir, surpris par son terme de mignon, là où elle voyait une vraie catastrophe.

— Je ne veux pas que vous en fassiez des tonnes… parce que supporter déjà ce qui est naturel chez vous m’est bien suffisant !

Camille fronça les sourcils, alors que Valentin se retenait de sourire devant sa nouvelle boutade.

— … mais aussi parce que se forcer à être ce qu’on n’est pas et faire ce qu’on ne veut pas n’est pas productif et sain.

 

Camille se radoucit devant ses propos.

— Donc, ne changez rien. Tout est OK. Prenez soin de moi comme d’habitude, mais juste ce qu’il faut, ne me mentez pas pour vos bêtises et apprenons chacun de l’autre et on formera une bonne équipe. OK ?

Camille dévisagea son patron, comme si c’était un autre homme qu’elle avait face à elle.

— Mademoiselle Bonin ?

— Oui ?

Valentin lui fit comprendre en levant ses sourcils qu’il attendait une réponse qui ne venait pas.

— Donc, je suis une bonne gouvernante à vos yeux ? Même si je n’ai pas un super CV ? Même si je fais des bêtises ? Même si je vous rembarre quand vous m’énervez ? Vous êtes vraiment fier de m’avoir à vos côtés ?

 

Valentin se trouva tout à coup troublé par ses questions aussi mignonnes que chargées d’une naïveté qu’elle ne réalisait pas, mais dont toute autre personne s’en trouverait déconcertée. Finalement, c’était bien cela qui lui plaisait le plus chez elle.

— Euh… Oui ! fit-il hésitant, attendant la suite.

— Promis ? Vous ne m’avez pas embauché juste pour rire de moi ou vous servir de moi ?

— Mademoiselle Bonin, je dois vous le dire en quelle langue ?

— Promis, promis ? insista-t-elle tout en tentant de lire la vérité en lui et en lui attrapant les joues et en serrant bien fort pour que leurs regards soient bien en connexion sur l’accord qui se jouait.

Valentin écarquilla les yeux devant son geste familier. Pourtant, ça lui plut. Elle lui rendait juste la pareille et il en était heureux.

— Oui ! Promis ! tenta-t-il de dire.

Camille relâcha la tension et lui sourit.

— Moi aussi, je suis fière de travailler pour vous, Monsieur Duval ! lui déclara-t-elle plus enjouée. Promis, si je fais une bêtise, je vous le dirai ! Je suis d’accord pour le feeling ! On forme une équipe du tonnerre ! Mais… on peut quand même garder la plante ? Non, parce que franchement, elle égaie un peu plus le salon et il faut toujours de la verdure. Ça apaise et ça crée de l’oxygène pour donner un air plus respirable dans la m…

— C’est bon ! l’interrompit-il en collant sa main sur sa bouche. J’ai compris aussi ! On garde la plante ! OK ! souffla-t-il, blasé. Mais en échange, on mange ces foutus spaghettis à la bolognaise ! J’ai trop faim ! grommela-t-il.

— Ouiii ! cria Camille, tout en se dégageant de sa main et lui sautant au cou. Sashimi va pouvoir vivre heureuse dans le salon avec nous !

 

Valentin resta interdit un instant entre sa gêne de l’avoir dans ses bras tout à coup et l’enthousiasme soudain qu’elle pouvait porter à…

— Sashimi ? Hein ? C’est quoi ça encore ?

Camille s’écarta de lui et le dévisagea comme s’il était stupide.

— Bah ? C’est ma plante ! Je l’ai rapatriée de chez moi ! Ça me faisait mal au cœur de la laisser. Mais le studio est trop petit ! Et la circonstance a fait que je pense qu’elle sera heureuse ici, dans le salon !

Camille se mit à applaudir et se leva, toute guillerette, pour réchauffer le repas. Valentin la regarda s’activer. D’abord déconcerté et perdu, le seul sentiment qui resta fut finalement une sensation de sérénité et de soulagement. Une familiarité était en train de s’installer entre eux et finissait par lui plaire. Il sourit en secouant la tête. Sa gouvernante était vraiment un cas à part. Un cas unique, complètement insondable, mais il l’avait choisie contre toute attente. Il l’avait trouvée et il s’en trouvait heureux.

Je crois de nous deux, c’est moi le plus bizarre en fait !

Camille se tourna vers lui pour le servir.

— Que ce soit clair…, lui dit-elle alors. Je mange avec vous, mais c’est une exception ! Une employée ne mange pas avec son patron ! Ça ne se fait pas !

Elle le toisa, comme si elle souhaitait imposer son commandement avec conviction. Valentin regarda son assiette et se mit à rire.

— Dit celle qui vient de sauter au cou de son patron et lui a écrasé les joues ! Ce n’est pas la peine de sortir la panoplie de la servante droite et rigoureuse maintenant qu’on a discuté. Ça manque de crédibilité !

Il rit de plus belle et lui attrapa la poêle des mains pour la servir.

— Je suis très sérieuse ! Heeeey ! C’est à moi de servir, pas à vous !

Elle tenta de lui récupérer la poêle de ses mains, mais ce dernier l’en empêcha tout en rigolant.

— C’est bien ce que je dis ! Niveau rigueur, déontologie et tout ça, il y a du travail !

Camille répondit à sa remarque par une moue boudeuse.

— Allez ! Ouste ! Assis ! ordonna Valentin. À table ! Et on ne grogne pas ! C’est moi le patron ! Voilà un cours de déontologie !

 


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