AVS2 – chap 3

Bonjour !

On continue ? Val et Cam vont-ils survivre à cette nouvelle ambiance ? Réponse ci-dessous !

© Jordane Cassidy - 2020

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3

 

" Accepte ce qui est, laisse aller ce qui était, aie confiance en ce qui sera. "

Bouddha

 

 

 

 

 

Les jours suivants se passèrent dans une harmonie difficilement sincère. Si Camille avait accepté le choix de Valentin, elle se montrait toutefois distante, se rendant compte que l'attirance entre Valentin et elle demeurait persistante. Elle ne restait pas dans la villa si cela signifiait voir Valentin avec Cassandre. Même s'ils étaient discrets, elle appréhendait leurs moments romantiques. Quant aux moments où Cassandre était absente et où ils se retrouvaient que tous les deux, ils se faisaient également plus rares. Si le soulagement de Valentin était là le premier jour, il se rendit vite compte que plus rien n'était comme avant : Camille contrôlait son attitude et ses allées et venues pour éviter toute situation ambiguë. Et cela jouait sur leur entente devenue plus maladroite, plus délicate, moins entière. Il y avait moins de cœur dans les actes de Camille. Valentin arrivait à le ressentir. Il y avait moins de petites attentions désintéressées, naïves. Il y avait une retenue claire, perceptible chez elle.

— Ça m'énerve ! conclut-il tout en lâchant son stylo sur son dossier

Ambroise redressa ses lunettes sur son nez et le fixa.

— Tu t'attendais à quoi ? C'était prévisible que ce chantier nous apporterait plus de boulot.

— Peut-être..., mais j'ai l'impression que le boss fait exprès de prendre des dossiers toujours plus compliqués ! Regarde déjà tous les autres dossiers en cours ! On ne s'en sortira jamais !

— D'ordinaire, ce genre de défi ne te fait pas peur. Tu es un bosseur.

— Oui, mais j'adhère de moins en moins à la politique du boss. Ces choix de clients m'inspirent de moins en moins, autant au niveau de la confiance que de la créativité que je peux avoir autour des projets demandés.

— Malheureusement, on n'a pas le choix, nous ! On va devoir y passer nos soirées !

— Fais chier ! Rien ne va en ce moment. J'en ai marre !

— Ta vie idyllique avec Cassandre n'est plus aussi… idyllique ?

— J'ai... du mal à me lâcher avec Cassie. Je sens que je me bride, me contient parce que Camille est là. Enfin non ! C'est plutôt parce que Cassie vit maintenant chez moi  que je ne sais plus avec qui je veux réellement être ! Non ! C'est parce que j'ai Camille en tête que je me bride avec Cassie ! Aaarggh ! C'est d'un compliqué !

Ambroise le fixa un instant face à son aveu, puis sourit.

— La venue de Cassandre brise ta petite bulle d'infidélité avec Camille. Donc, maintenant, tu ne sais plus qui te gêne le plus : Camille ou Cassandre ?

— Je ne sais pas ! Aucune des deux ne me gêne, c'est juste que je n'arrive plus à vivre pleinement ma vie de couple. Je repousse l’inéluctable moment d'intimité avec Cassie en prétextant que je suis fatigué, que ce n'est pas le moment, que j'ai du travail... Je ne suis pas réglo ni avec elle ni avec moi-même. J'ai une partie de moi qui reste tournée vers Camille et c'est ce qui fait que je ne suis pas bien moralement. Ce n’est ni la faute de Cassie ni celle de Camille. Cassie est plutôt facile à vivre et Camille reste à sa place... Trop à sa place à mon goût.

— Tu voudrais quoi ? Un ménage à trois ?

— Très drôle ! Même ainsi, je ne suis pas certain d'être heureux !

— Tu as fait ton choix ! Tout comme notre patron, tout ne peut pas être parfait derrière, mais si c'est bon pour tout le monde...

— Je sais... Je devrais être heureux que tout soit en ordre, chaque chose à sa place, mais... l'insouciance de Camille me manque. Elle se montre attentive, mais ce n'est plus pareil. Quelque chose s'est brisé. Elle réfléchit davantage et surtout, elle pense à elle de penser à mon bien-être, ce qu'elle ne faisait pas jusque-là. Si elle agit avec autant de retenue, c'est que quelque part, elle veut contrôler notre relation pour que tout le monde souffre le moins possible. Ça me fait mal de la voir opter pour un tel comportement. Je n'ai plus la Camille que je connais en face de moi. Elle aussi, elle avait une partie d'elle tournée vers la personne qui lui est la plus importante à ses yeux ; une partie d'elle m'a quitté...

— Et tu en souffres ?

— Atrocement ! fit Valentin en baissant les yeux. Elle n'est plus à cent pour cent pour mon bien-être et c'est évident que ça me manque. Ses attentions, son insouciance, sa bienveillance... même ses reproches, tout est canalisé ! Je déteste ça ! Et le pire, c'est que je ne peux rien dire. Je l'ai blessée, donc je dois respecter sa réserve. Malgré tout, ça m'agace, car je veux tout. En plus d'être un goujat, je suis un égoïste !

Valentin souffla, le visage vraiment triste.

— Je ne suis vraiment qu'un pauvre type !

— Tu es surtout perdu ! rétorqua Ambroise. Laisse le temps faire les choses. Tout est encore très frais. Camille a sans doute besoin de recul, tout comme toi !

— Tu as raison... Ce n'est pas pour autant que ça me convient ! Camille a voulu continuer à travailler pour moi et j'admire sa force de caractère. Pour autant, j'en viens à me dire que sa démission aurait peut-être facilité les choses pour nous tous. Ce ménage à trois sonne faux. Il n'y a plus de sincérité. Camille et Cassandre cohabitent sans vraiment s'apprécier, moi je suis au milieu, à rester indécis et tout le monde en pâtit. Mettre de la distance aurait été plus simple...

— Mais tu ne peux te résoudre à laisser partir Camille.

— Mais je ne peux me résoudre à laisser partir Camille, oui.

— Si elle reste, tu auras toujours la tentation. Tu t'en rends bien compte ?

— Je sais... Je joue avec le feu. Mais ce feu m'apaise aussi. Il fait du bien à ma vie. Il la réchauffe d'une autre façon. Comment pourrais-je m'en séparer ?

— Tu ne vas pas avoir le choix si la situation actuelle bloque ton engagement avec Cassandre. Si Cassandre est vraiment la personne la plus importante à tes yeux, il va falloir que le patron que tu es vire sa gouvernante.

 

♥♥♥♥♥

 

— Qu'est-ce que ça sent bon !

Cassandre huma l'air ambiant avec bonheur.

— Après une telle journée, ça ne peut qu'ouvrir l'appétit !

— Bonjour Mademoiselle ! dit Camille, respectueusement.

— Bonsoir. C'est quoi qui sent comme ça ?

— Des nouilles japonaises sautées aux petits légumes.

— Whouaaa ! J'espère que Val ne va pas tarder. J'ai la dalle !

— J'ai dressé les couverts sur la table de la terrasse. Je me suis dit que ça pouvait être sympa de profiter de l'air doux de ce soir. En plus, il fait jour tard. Vous pourrez assister au coucher de soleil.

— Bonne idée !

Cassandre se rendit de ce pas sur la terrasse pour apprécier le travail de Camille et sourit.

— Superbe ! Il y a même la petite bougie ! Ça fait très « tête-à-tête » ! J'adore ! Merci !

— De rien. Je vous laisserai en amoureux. Il vous faudra donc faire le service par contre, si ça ne vous dérange pas.

— Pas de soucis !

Cassandre sautilla de joie et se frotta les mains. C'est à ce moment-là que Valentin rentra, le visage épuisé par sa journée.

— Bonsoir mon chéri ! fit Cassandre en l'embrassant.

Valentin se laissa embrasser sans pour autant dire un mot. Il salua ensuite Camille d'un signe de tête.

— Tu sembles exténué.

— Oui, on a du boulot par-dessus la tête. Les prochaines semaines risquent d'être compliquées. Certains partent en vacances et on va certainement faire des heures supplémentaires.

Il posa ses affaires et s'étira.

— Ce soir, tu vas pouvoir souffler. Camille nous a organisé un tête-à-tête sur la terrasse !

— Quoi ? répondit rapidement Valentin, surpris par la nouvelle.

— Oui, regarde ! Elle a tout préparé pour nous laisser en amoureux ! Un souper à la lumière de la bougie, c'est une gentille attention, n'est-ce pas ?!

Valentin jeta un regard dur à Camille que cette dernière encaissa sans trop savoir comment l'analyser.

— Vous n'étiez pas obligée d'en faire autant ! lui déclara-t-il, la mâchoire serrée.

— Pourquoi tu lui fais le reproche ? lui demanda Cassandre, surprise.

— Cela ne me gêne pas de le faire ! l'interrompit Camille. Mademoiselle doutait de moi la dernière fois avec mes crêpes. Je lui montre qu'elle n'a pas à s'inquiéter, que je sais me tenir à ma place et que je respecte votre couple.

Elle lui fit alors un sourire poli que Valentin dût accepter sans broncher, même si une telle réponse sonnait trop calculée, trop réfléchie.

— Je vais maintenant vous laisser et regagner mes appartements.

Valentin leva les yeux devant son ton si solennel.

Mes appartements ? N'importe quoi ? 

— Il passe le troisième film d'Angélique. J'ai raté le second. Hors de questions que je rate cet épisode !

— Aaah ! C'est donc pour ça, le repas en tête-à-tête ! commenta Cassandre, de façon amusée. Notre couple pour servir vos intérêts ? Une diversion !

— Oh, mais je suis aussi sincère pour la bonne marche de votre couple. Je souhaite que votre emménagement aide à l'évolution de vos projets communs.

 

Valentin regarda la table dressée et ne put dire un mot sans avoir le doute de laisser sa langue fourcher et révéler tout ce qu'il avait sur le cœur face à toute cette mascarade. Le cœur... Avait-elle vraiment fait cela avec le cœur ? Camille était sans doute sincère, mais cela l'énervait qu'elle encourage le bon fonctionnement de son couple alors qu’intérieurement, elle souffrait certainement. Son dévouement en arrivait à l'écœurer. Il prenait une dimension qui lui déplaisait au plus haut point. Et pourtant, il devrait la remercier. C'était là des considérations logiques qu'elle pouvait avoir pour lui et c’était la pire des gratitudes qu'il devait avoir envers elle. Il ressentait jusque dans ses entrailles cette idée de sacrifice qu'elle faisait pour le bonheur de son patron.

— Passez une bonne soirée cinéma ! lui déclara Cassandre, reconnaissante.

— Vous de même !

Camille regarda une dernière fois Valentin qui se contentait de replacer les couverts sur la table en silence. Il refusait de lui souhaiter une bonne soirée. Une soirée film avec ses M&M's, mais sans lui. Il préférait réfuter tout ce qui pouvait servir à légitimer son acte de bienveillance vis-à-vis de Cassandre et lui, ce soir. Il n'avait pas cette force, ce courage, cette reconnaissance. Malgré l'ignorance qu'il manifestait à son égard et son manque d'enthousiasme devant ses efforts, Camille sourit à Cassandre et décida de les quitter sans plus attendre.

L'interphone sonna alors.

Valentin sortit de sa retraite et questionna du regard les deux femmes sur l'identité du visiteur impromptu qui attendait devant le portail. Au vu du grand étonnement de chacune, il lâcha un long soupir las et s'enquit de découvrir son invité mystère sur l'écran de l'interphone. Un homme brun, plutôt grand, attendait devant chez lui. Il faisait taper son poing dans la paume de son autre main pour évacuer un stress évident.

— Oui... se contenta de dire Valentin à travers l'interphone.

Le gars, surpris par sa voix, se précipita près de l'interphone.

— Euh... Bonsoir... Excusez-moi de vous déranger. On m'a dit que Camille Bonin travaillait ici. Puis-je lui parler, s'il vous plaît ?

 

Valentin écarquilla les yeux et se tourna vers les deux femmes qui voulaient satisfaire leur curiosité, et en particulier la première concernée. Le visage de cette dernière se décomposa sous les yeux de Valentin lorsqu'elle vit l’homme à travers l'écran. D'abord, il vit une note d'effroi comme si elle avait vu un fantôme, puis il perçut de la surprise et de l’incompréhension lorsqu'elle analysa vraiment les choses. Enfin, la tristesse, la nostalgie, l'espoir. Ses yeux s'humidifièrent, mais ses lèvres esquissèrent un sourire.

Sans même attendre l'aval de Valentin, Camille ouvrit la porte d'entrée et fonça vers le portail. La réaction hâtive de cette dernière inquiéta Valentin, craignant alors que le pressentiment qui étreignait sa poitrine se vérifiât. Il décida de la suivre, accompagné de Cassandre ne souhaitant pas être la laissée pour compte. Camille ouvrit le portillon et son souffle fort, désordonné, parla pour elle. Elle ne rêvait pas. Il était bien là, devant elle. Il lui souriait, avec ce même regard brillant qu'à l'époque, lorsqu'il était heureux, lorsque quelque chose attirait son attention avec envie.

— Enfin trouvée !

— Qu'est-ce que...

—... Je fais là ?

Camille tenta d'avaler un peu de salive pour hydrater sa gorge qui l'empêchait d'articuler correctement ses mots, en vain.

— Je suis venu récupérer ce que j'ai été contraint d'abandonner !

L'oxygène manqua à ses poumons. Camille resta stupéfaite. Sa vie passée venait de se dérouler pendant quelques secondes dans sa tête. Elle revit tous ces moments de bonheur, sa tristesse aussi. Sa poitrine se soulevait encore et encore, cherchant à emmagasiner le plus d'air possible pour confirmer qu'elle était toujours en vie après cette révélation.

Valentin, à quelques mètres d'eux, vivait l’instant par procuration. Il savait qui était cet homme. En voyant la réaction de Camille, il savait ce qu'elle ressentait et devinait qui pouvait la mettre dans cet état. Lui-même avait sa poitrine qui lui faisait mal.

— À ton avis, qui est-ce ? lui chuchota Cassandre à l'oreille.

Valentin se contenta de regarder droit devant, cet homme qui n'était jusqu'à présent qu'une évocation :

— Thomas.

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